Soigne ta gauche

A trois euros le sentiment d'être un vrai révolté, un pirate, un bagnard, un Papillon et un Vallès, un Valjean et un Jean Moulin, un Vercors et un Jean Prévost, on s'en voudrait de ne pas avoir acheté le livre de Stéphane Hessel. Et donc, on a.

Las ! nous avions oublié que Stéphane Hessel fut, longtemps, un éminent représentant de la seconde gauche, cette rocardie qui est à la révolte ce que François Fillon est à Ayrton Senna. Nous attendions des barricades, on nous propose de vigoureuses manifestations République-Nation. Nous attendions des têtes, des piques, des Carmagnoles, il nous faudrait pétitionner.

La Sarkozie, c'est pas bien. Ce qu'on fait aux Roms, c'est pas bien... Discours lénifiant de cette gauche morale, bienfaisante et cul-cul, ces gentils gens de gauche, bien installés, au chaud, financièrement abrités et qui, depuis janvier 1996, n'ont rien su faire.

Stéphane Hessel, diplomate, éminent membre du Quai d'Orsay, un des très rares "vrais" Ambassadeurs de France en parangon de la Révolution ? Allons donc, encore un songe creux pour les endormis.

Pour les autres, gardez le livre : on utilisera les feuilles pour allumer les Molotov.

En ce début d'année, déprime post réveillons, foie en berne, frimas de l'hiver, un spectacle retient toute notre attention. Manolo Tango se produit gratuitement, 35 heures durant, sur le parvis de l'Hôtel de Ville d'Evry.

Entrechats et voltes, il est, comme à son habitude, déconcertant. On l'attend à gauche, le voilà à droite. On le pense au centre, il se déporte et double, avec la grace d'un Carlos Sainz au volant d'une Volkswagen dans la pampa argentine, Nico la talonnette et Jean-François Coopté.

Dieu, quelle grâce ! Dieu, quelle élégance ! On le savait capable, en demi-pointes, de débarrasser le marché d'Evry de ces négroïdes faciès qui salissent nos télés, on le savait déjà léger comme Brice l'Auvergnat en matière sécuritaire, on le découvre soudain phénix de la pensée économique, Milton Friedman de l'Essonne, Adam Smith de sous-préfecture.

Déjà quelle belle année que 2011 :  Manolo Tango pense, enfin, il se découvre une idéologie. Mais quelle mouche a donc piqué Benoît Hamon de s'en offusquer. Même libérale, qu'une idée ait traversé la tête de Manolo Tango mériertait qu'on sabre le champagne rue de Solférino.

Pitié, Martine, garde-toi de le faire revenir dans le droit chemin. Manolo, c'est notre "Vaca qui rigola" à nous, un éclat de rire garanti tous les quinze jours. Manolo, c'est un socialiste tellement à droite que Nico ne peut lui proposer un Ministère : on hurlerait au retour de l'Etat UMP.

Quant à 2012, c'est dans moins longtemps qu'hier.